Après la lecture de cette interview, vous voudrez tester la Gemme, la monnaie locale de Gironde !
Qui ne s’est jamais interrogé sur le rôle des monnaies locales en France ? Le sujet peut sembler en décalage avec notre société mondialisée… C’est pourtant tout l’intérêt d’une monnaie comme la Gemme : se mettre au service d’une économie locale plus vertueuse. Et donc respectueuse de l’environnement. On a fait le point avec Aurore Bonneau, coordinatrice de l’association La Gemme, qui pilote le déploiement de la monnaie girondine.
Bonjour Aurore ! Aujourd’hui, on va parler « argent », mais pas n’importe comment : vous nous présentez la Gemme, la monnaie locale de notre département…
Aurore Bonneau : « Bonjour et merci de votre accueil. En effet, en tant que coordinatrice de l’association La Gemme, je suis là pour superviser le déploiement et l’utilisation de notre monnaie locale girondine. Tant auprès des professionnels que des particuliers et des collectivités. »

Aurore Bonneau, coordinatrice de l’association La Gemme en Gironde
Chez Arcachon Ecotours, on suit le développement de la Gemme depuis ses débuts. Fin 2023, quel est le bilan pour la monnaie locale ?
« Il faut savoir que le concept de monnaie locale émerge en France depuis 2010. Il a été reconnu comme titre de paiement en 2014, par la loi de l’Economie Sociale et Solidaire. La Gemme existe quant à elle depuis 2022 : elle est née de la fusion de deux monnaies, celle de Bordeaux (la Miel) et celle du Bassin d’Arcachon (l’Ostréa).
Aujourd’hui, notre monnaie locale est un outil qui favorise une économie plus vertueuse en permettant de consommer localement et durablement. A date, la Gemme rassemble entre 100 et 150 professionnels (artisans, commerçants, associations…), entre 250 et 350 particuliers utilisateurs et même 3 collectivités (les villes de Bordeaux, Bègles et La Réole) ! »
Quels sont les avantages d’une monnaie locale comme la Gemme ?
« La Gemme a un impact positif sur l’environnement, car elle incite les gens à consommer des produits de qualité au plus proche de chez eux. Notre monnaie locale est complémentaire de l’euro (1€ = 1 gemme), avec un avantage : l’assurance que l’argent dépensé restera dans le cycle de l’économie locale !
Pour un professionnel de Gironde, c’est l’occasion d’intégrer un réseau pro qui partage le même ancrage local, et d’attirer une clientèle sensible aux enjeux du commerce de proximité. Quant au citoyen qui paye en gemmes, il récupère en effet un certain pouvoir d’agir sur l’économie locale de son territoire. En tant qu’ancienne artisane-tapissière, je suis personnellement très attachée à cela.
Et je suis aussi ravie que les collectivités jouent le jeu ! Le fait que certains élus acceptent de recevoir une partie de leur indemnité en monnaie locale démontre la volonté de la ville de s’inclure dans un schéma d’économie circulaire. A Bordeaux, un professionnel peut par exemple s’acquitter de ses droits d’enseigne via la Gemme. D’autre part, il sera bientôt possible pour un citoyen de payer ses entrées dans certains lieux municipaux avec la monnaie locale. »
Comment un habitant de Gironde peut-il se procurer et utiliser de la monnaie locale ?

La Gemme, monnaie locale qui œuvre à une économie et un environnement plus vertueux !
« Il suffit d’adhérer à l’association et d’échanger ensuite ses euros en gemmes : soit physiquement, en comptoir de change, soit via son compte numérique, avec l’application dédiée (qui sert de moyen de paiement). Ensuite, vous dépensez la monnaie locale auprès des commerçants du réseau, que vous retrouverez ici.
Il faut aussi savoir que tout le change est déposé sur un fonds de garantie à la NEF, une coopérative bancaire qui agit pour une finance plus éthique. Autrement dit, cet argent est réinvesti, notamment par l’octroi de prêts pour des entreprises innovantes. »
Agir pour un environnement durable, c’est aussi faire preuve de solidarité et de résilience. Comme dans votre expérimentation de Sécurité Sociale de l’Alimentation Etudiante avec la Gemme ?
« Tout à fait ! La sécurité sociale alimentaire est un sujet universel et porté au niveau national, en s’inspirant de notre propre système de Sécurité Sociale. En région, nous travaillons avec le CREPAQ, une super association qui œuvre au bien commun, sur la création d’une caisse locale auprès des campus bordelais.
L’expérimentation a débuté à la rentrée 2023. 150 étudiants volontaires et concernés par la précarité alimentaire ont été tirés au sort. Chacun a reçu un portefeuille numérique en gemmes. Tous les mois jusqu’à l’été prochain, ils percevront 100 gemmes (en contrepartie d’une cotisation libre et mensuelle d’un montant de 10 euros) à dépenser auprès des magasins ou producteurs membres du réseau. C’est une belle manière de lutter contre la précarité alimentaire, qui touche de plus en plus de Français, et de faire vivre des professionnels qui valorisent l’humain et l’environnement à travers des productions bio, locales, de saison, en vrac, etc.
J’en profite pour remercier les soutiens financiers de ce projet de Sécurité Sociale de l’Alimentation Etudiante : la ville de Bordeaux, le département de Gironde, la Région Nouvelle-Aquitaine, la Fondation de France, Carasso, la Fondation Bordeaux Université, Domofrance, le Crédit Mutuel du Sud-Ouest, ALTAA, Bordeaux Métropole, les Universités de Bordeaux et Bordeaux Montaigne. »
Comment faire passer le mot pour développer ce recours à la monnaie locale de Gironde ?
« L’association La Gemme s’est professionnalisée et compte aujourd’hui 3 salariés, mais elle est avant tout portée par des bénévoles. La participation citoyenne est clé pour nous. On a besoin de gens qui croient à cette idée de cercle vertueux de notre économie locale et qui veulent en être ! Nous sommes donc en recherche de bénévoles pour animer des tables d’informations, tout au long de l’année. L’objectif ? Parler de la monnaie locale et accompagner son déploiement.
D’ailleurs, l’association La Gemme participe à la semaine « Par ici les monnaies », organisée à Bordeaux du 27 novembre au 2 décembre 2023. Au programme : tables rondes et ateliers de Fresque de la Monnaie. Suivez-nous sur Facebook, Instagram et LinkedIn pour le détail de l’événement ! »

Martine Lagarde, bénévole du bassin d’Arcachon, lors de la journée « Les pieds dans L’Pat (projet alimentaire de territoire)
Notre rédactrice Marine Boissière a écrit cet article. D’ailleurs, retrouvez-la sur LinkedIn.
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